extractivisme

L'extractivisme,
c'est quoi ?

Rédaction Tilt le 25/02/2025

4 min de lecture 🧠   Niveau « J'y connais rien »

Chaque année, des millions d’hectares de forêts disparaissent, des rivières sont polluées et des populations déplacées au nom d’une seule logique : extraire toujours plus de matières premières. Derrière ces destructions, un modèle : l’extractivisme. C’est quoi exactement ? On t’explique.

Extractivisme : Creuser, forer, raser

Le terme est méconnu mais nos objets du quotidien en sont le produit. Le cuivre dans les câbles électriques, le lithium dans nos smartphones, le cobalt dans les ordinateurs… L’extractivisme, c’est l’exploitation intensive des ressources naturelles – minerais, pétrole, gaz, forêts, terres agricoles… – pour alimenter les marchés internationaux. On extrait, on exporte, on s’enrichit, sans jamais se soucier des conséquences à long terme. En bref, l’extractivisme est le moteur de notre monde hyperindustrialisé. 

Ce modèle est un héritage direct du colonialisme. À l’époque, les puissances européennes pillaient les matières premières des colonies puis les exportaient vers l’Europe, sans bénéfice pour les populations locales. Aujourd’hui, le schéma est assez similaire mais avec les multinationales à la manœuvre. En Amérique latine, en Afrique ou en Asie du Sud-Est, l’extractivisme est souvent la principale source de revenu des États… au prix de grandes catastrophes écologiques et humaines.

Des ressources à extraire, une planète à bout de souffle

Pour tourner, l’économie mondiale a besoin de plus en plus de ressources. Depuis 1970, la consommation mondiale de matières premières a triplé, passant de 27 à 92 milliards de tonnes en 2017

Sans surprise, cette extraction massive ravage les écosystèmes naturels. D’après l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’exploitation minière serait responsable, à elle seule, de 7 % de la déforestation mondiale. Ces activités ne laissent jamais la terre indemne. Les mines à ciel ouvert, par exemple, libèrent des métaux lourds comme le mercure et l’arsenic qui contaminent les rivières et empoisonnent les communautés qui en dépendent.

Côté biodiversité, le constat est tout aussi alarmant. Selon une étude publiée dans la revue Current Biology, 8 % des espèces vertébrés seraient menacées par l’industrie minière. Poissons, mammifères, amphibiens, reptiles…  Près de 5 000 espèces  risquent de disparaitre.

Un désastre humain

L’extractivisme rime souvent avec spoliation et violation des droits humains. Chaque année, des milliers de personnes sont expulsées de leurs terres pour laisser place à des mines, des barrages ou des exploitations agricoles. Le plus souvent, il s’agit de populations autochtones qui assistent impuissantes à la destruction de leur habitat traditionnel pour des projets prétendument censés développer l’économie locale.

En réalité, les seuls fruits que ces populations récoltent ont souvent un goût de catastrophe. Comme en 2018 au Brésil, quand l’effondrement du barrage minier de Brumadinho a tué 272 personnes et déversé des millions de mètres cubes de déchets toxiques dans une rivière qui nourrissait 200 000 personnes.

Et quand les populations résistent, la répression peut être brutale : criminalisation des militants écologistes, assassinats de leaders autochtones, violences policières... Selon l’ONG britannique Global Witness, un tiers des 177 défenseurs de l’environnement assassinés en 2022 était issu d’une communauté indigène.

Le néo-extractivisme : un piège économique  

Après la décolonisation, de nombreux gouvernements se réclamant de gauche ont vu dans l’extractivisme un moyen rapide de développer leur économie. Quand d’abondantes quantités de ressources naturelles se nichent sous nos pieds, pourquoi ne pas s’en servir pour réduire les inégalités et mieux redistribuer les richesses ? C’est ce qu’on appelle le néo-extractivisme : quand l’État garde le contrôle de l'exploitation des ressources pour financer des programmes sociaux. Mais les fins vertueuses n’empêchent pas la dégradation des écosystèmes.

Même sur un plan strictement économique, l’extraction n’est pas une solution viable car elle plonge les États dans une situation de dépendance extrême. Plutôt que d’investir dans les industries locales ou des alternatives durables, les gouvernements misent tout sur l’exploitation des ressources. Résultat : quand les cours des matières premières s’effondrent, toute l’économie vacille. Le Venezuela en est un triste exemple : après des années de prospérité grâce au pétrole, l’économie s’est effondrée en même temps que les prix de cette ressource, au tournant des années 2010.

Comment sortir du modèle extractiviste ?

Face à ce modèle destructeur, des solutions existent : 

  • Aider les pays du Sud à diversifier leur économie. S’affranchir de la dépendance aux ressources naturelles a un coût que les pays concernés n’ont pas toujours le luxe de s’offrir. En Équateur, le programme « Yasuní ITT » proposait de renoncer à l’exploitation d’un important gisement de pétrole découvert dans une région riche en biodiversité moyennant une compensation internationale. Le projet n’a jamais abouti, faute de financements suffisants.
  • Protéger les territoires menacés à travers la création de zones protégées et En défandant les droits des populations autochtones.
  • Réduire notre consommation. En Europe, on n’a pas de pétrole mais on a très envie de consommer. L’Union européenne est le deuxième plus grand importateur de matières premières. Notre dépendance à l’extractivisme pousse à la destruction d’écosystèmes entiers. Encourager l’économie circulaire, recycler les matériaux et limiter l’obsolescence programmée sont de bons moyens pour limiter la demande en ressources.  
     

"L’extractivisme a été une constante de la vie économique, sociale et politique de nombreux pays du Sud. (…) Cette dépendance à l’égard des métropoles, par l’extraction et l’exportation de matières premières, est restée pratiquement inchangée jusqu’à aujourd’hui. La modalité d’accumulation extractiviste semble être au cœur de la proposition productive des gouvernements tant néolibéraux que progressistes."

Alberto Acosta, économiste équatorien

Biodiversité Ressources naturelles

Par Rédaction Tilt

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