Singapour : reverdir la cité

Ville-État limitée par des frontières étriquées, Singapour cherche un nouveau souffle et remet la nature en ville. Le pays, qui a détruit presque toutes ses mangroves, réalise aujourd’hui qu’elles constituent un vrai trésor qui vaut la peine d’être protégé.

Singapour : la ville aux corridors verts

Singapour, dans l’imaginaire collectif, c’est d’abord un des hauts lieux de la finance et du business international. On connaît son Grand-prix automobile ou ses buildings de verre. Mais on oublie bien vite que ce n'est pas un grand pays. C'est même totalement minuscule. Car Singapour c’est aussi une des métropoles les plus denses au monde, avec près de six millions d’habitants répartis sur seulement 734,3 km2 – soit la taille de la commune d’Arles... Six millions de Singapouriens qui étouffent…poussant la ville-État à se transformer en ville verte.

Et le résultat est spectaculaire : des arbres qui poussent sur les centres commerciaux, des façades qui se végétalisent, des rues qui se colorent de fleurs tropicales. Ce pays, 100% urbain, a accueilli en 2012 la première ferme verticale du monde (« Sky Greens ») composée de 120 tours en aluminium de 9 mètres de hauteur, implantée en ville. Rapidement, l'ancienne ligne de chemin de fer reliant le pays à la Malaisie est devenue un "corridor vert" avec 24 km de verdure. Les derniers espaces verts sont dorénavant protégés dont les mangroves. Et on peut dire qu’il y avait urgence : Singapour a déjà perdu 95% de ses forêts de mangroves originales.

La mangrove : d’abord mal vue, aujourd’hui célébrée

Pendant des siècles les mangroves ont été pourvoyeuses de nourriture, de bois de chauffage ou de construction, de plantes médicinales... Et puis les bâtisseurs ont manqué d’espace. Jugées laides, impraticables, inintéressantes, elles ont été rasées. Une pratique qui ne concerne pas que Singapour : selon la FAO, les mangroves présentes dans le monde auraient perdu plus de 20% de leur superficie au cours des 40 dernières années !

Or aujourd’hui, on sait que les mangroves sont loin d’être inutiles. De plus en plus d’études scientifiques mettent en avant les multiples services que ces mangroves rendent à notre humanité : leurs racines cassent les vagues et protègent les côtes de l’érosion et de la montée des eaux, elles représentent un excellent piège à carbone plus efficace que la forêt tropicale, elles servent de tampon face aux cyclones et aux tsunamis, par temps sec elles restituent l’eau absorbée durant les crues, etc. Sans compter qu’elles abritent une biodiversité cruciale qui ne cesse de nous surprendre. Dans les seules mangroves de Singapour, au moins 67 espèces nouvelles pour la science ont été découvertes depuis les années 1980, comme le nouveau crabe Haberma nanum. Les mangroves constituent également le lieu de reproduction d’une multitude d’espèces de poissons, reptiles, insectes, mais aussi un refuge pour tous les oiseaux migrateurs. Les humains commencent tout juste à comprendre l’étendue des services rendus par les mangroves.