
Efficacité énergétique : quel
avenir pour nos bâtiments ?
Nicolas Guichard
Le secteur du bâtiment est responsable de plus d’un tiers des émissions mondiales de CO2, et c’est en grande partie à cause de leur consommation énergétique (PNUD, 2022). Entre précarité énergétique, manque de main-d’œuvre qualifiée et défis d’adaptation à des météos de plus en plus extrêmes : il est urgent de repenser nos bâtiments de demain ! Mais face à un parc immobilier souvent mal isolé, comment améliorer l’efficacité énergétique de nos bâtiments ? Pourquoi l’efficacité énergétique est-elle un pilier essentiel de la transition écologique ? Et quels sont réellement les impacts d’un bâtiment mal isolé ? On a interviewé Nicolas Guichard, responsable de la division Énergie à l’Agence française de développement, pour répondre à ces questions cruciales !
Tilt : C’est quoi l’efficacité énergétique ?
Nicolas Guichard : L'efficacité énergétique, c'est essayer de consommer moins d'énergie pour avoir la même performance ou pour bénéficier du même confort lorsqu'on est dans un bâtiment, c'est-à-dire avoir la même qualité de service en consommant moins d'énergie. Ça peut se traduire de plein de façons différentes, par exemple on parle d'efficacité énergétique dans l'industrie mais aussi dans les transports où on va essayer d'avoir des moteurs plus efficaces.
Quel est le lien entre efficacité énergétique et changement climatique ?
N.G. : C’est un enjeu de transition énergétique, mais c’est un enjeu aussi de lutte contre le changement climatique, parce que le secteur des bâtiments c'est un peu plus d'un tiers des émissions de CO2 au niveau mondial. En France, c’est même plus de 40%.
Donc si on veut essayer de réduire les émissions, il faut travailler sur ce secteur. C'est vraiment un pilier très important de la lutte contre le changement climatique. Par exemple en France, le sujet, ça va être le chauffage dans nos logements, parce que le chauffage pour un ménage c'est à-peu-près 60% de sa consommation d'énergie.
Dans les pays du Sud on voit une explosion de l'utilisation de la climatisation. Et cette électricité dans énormément de pays du monde, pour l'instant, elle est encore produite beaucoup à partir d'énergies fossiles, de charbon dans certains cas, de gaz ou de fioul, et donc c'est encore plus d'émissions de CO2.
C’est quoi l’effet rebond ?
N.G. : On parle d'effet rebond pour l'efficacité énergétique dans les bâtiments lorsque qu'on a un bâtiment mieux isolé, ou des équipements qui consomment chacun moins d'énergie (un frigo plus efficace, des lampes basse consommation) : on va consommer moins d'électricité et on va voir notre facture d'électricité diminuer.
Mais du coup, ça peut générer des marges de manœuvre financières. Et si on les utilise pour ajouter des équipements qu'on n'avait pas avant, par exemple, se mettre à consommer différemment, on peut se mettre à consommer finalement plus qu'avant parce qu'on a fait au départ des efforts d'efficacité énergétique.
Quels sont les obstacles à l’amélioration de l’efficacité énergétique ?
N.G. : Les obstacles à l'amélioration de l'efficacité énergétique se posent peut-être de façon différente dans des contextes comme celui de la France ou de l'Europe et des pays plus en développement.
En France ou en Europe, on a principalement un sujet de rénovation. On a des logements, un parc immobilier qui est quand même très ancien, en majorité. On a aussi la complexité des démarches sur le plan administratif. C'est pas facile de savoir à quoi est-ce que j'ai droit comme aides, comment je peux y accéder, comment je fais un diagnostic ?
Et un troisième frein pour le cas français, c'est le manque de main-d'œuvre qualifiée dans certains des métiers de la rénovation des bâtiments.
Dans les pays d'intervention de l'AFD, la problématique, c'est plutôt la construction des nouveaux bâtiments.
Dans ces pays, il y a vraiment une vague de construction de nouveaux bâtiments très importante. D'ici 2050, la moitié des bâtiments qui existeront au niveau mondial n'ont pas encore été construits. C'est-à-dire qu'on va presque doubler d'ici 25 ans le nombre de bâtiments qui existent dans le monde !
Et donc là, le frein, ça va être plutôt sur le financement de ces bâtiments plus efficaces parce que ça coûte un peu plus cher de faire un bâtiment nouveau, plus efficace, qu'un bâtiment classique.
Il peut y avoir aussi des sujets de besoins de formation, de main-d'œuvre et des freins au niveau des réglementations nationales. Donc maintenant, c'est vraiment une question de volonté politique forte si on veut relever ce défi et accélérer.
MasterTilt, c’est quoi ?
MasterTilt, ce sont des interviews d’expert.e.s qui reviennent en profondeur sur leur sujet d’étude : d’abord, ils.elles décryptent les défis du monde, ensuite, ils.elles nous donnent leurs bons tuyaux pour agir.
Par Rédaction Tilt
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