coiffe indienne
# Tiltionnaire

L'appropriation culturelle, c'est quoi ?

Rédaction Tilt le 25/01/2024

4 min de lecture 🧠   Niveau « J'y connais rien »

Les coiffes indiennes des mannequins de Victoria Secret, le twerk de Miley Cyrus, en passant par le rock’n’roll d’Elvis Presley, l’appropriation culturelle suscite de nombreuses controverses. Mais de quoi parle-t-on exactement ? On t’aide à y voir plus clair !

L'appropriation culturelle, définition d'un concept polémique

C’est aux États-Unis, dès les années 1990, qu’apparaît le concept d’appropriation culturelle. Les études postcoloniales sont passées par là et on s’intéresse à la place des cultures minorisées dans l’espace social et culturel. Mais ce sont surtout les nombreuses polémiques dans les milieux artistiques et de la mode qui vont propulser ce concept sur le devant de la scène médiatique. Madonna est accusée de voler la culture berbère en portant une coiffe amazighe, Miley Cyrus de mimer la culture noire en twerkant, la marque Victoria Secret de ne pas respecter les cultures amérindiennes en arborant ses mannequins avec leurs coiffes lors des défilés, …

L’appropriation culturelle, c’est l’idée que les personnes blanches s’approprient l’art et la culture des minorités ethno-raciales et de populations non occidentales pour en tirer profit, sans en reconnaître l’origine ni la signification profonde. L’identité de la culture empruntée se transforme en marchandise standardisée, ou en un « style » pour les stars et les grandes marques, déconnectée de leurs significations culturelle, symbolique et religieuse. Pour la chercheuse bell hooks, autrice de « Black Looks: Race and Representation », l’appropriation culturelle revient à « manger l’Autre », le dévorer pour mieux le vider de sa substance.

Quand l'appropriation rapporte

Mais comment différencier l’appropriation d’un échange culturel authentique ? Vaste question… parce qu’après tout, les interactions entre les cultures ont toujours existé ! Mais reconnaître cette constante historique ne doit pas occulter le fait que ces échanges sont parfois fondés sur des dynamiques de domination et d’exploitation.

Il est donc important de distinguer appropriation et assimilation.

L’appropriation, c’est l’utilisation des codes d’une minorité pour son esthétique – par exemple, être blanche et porter des tresses africaines. L’assimilation, au contraire, répond à la volonté de se conformer aux codes esthétiques dominants – par exemple, avoir les cheveux crépus et se les lisser.
Quelle différence ? Simple : le bénéfice engendré par l’appropriation. Pour les membres de cette culture minorisée, il peut être injuste de voir des personnes blanches porter des signes ostentatoires de leur culture et en tirer profit alors même qu’on ne remarque jamais ces mêmes signes sur eux. Prenons un exemple concret : quand Cara Delevingne, mannequin blanche, porte des dreads ou des tresses, toute la presse mode est en ébullition. Mais lorsqu’il s’agit d’une mannequin noire, personne ne le remarque ! Pire encore : la culture appropriée n’est souvent ni citée ni comprise dans sa signification première.

Fonder les bases d'un échange culturel équitable

Est-ce que ça dire qu’il faut proscrire tout échange entre les cultures ? Bien sûr que non ! Mais on doit encourager les interactions justes et équitables. Un échange culturel équitable, c’est avant tout reconnaître et respecter la culture empruntée : se renseigner sur ses significations spirituelles, religieuses ou sociales, mais aussi éviter de singer la culture ou de la réduire à un stéréotype.

Cette reconnaissance implique de replacer les communautés minorisées au centre, en leur redonnant toute la place qu’elles méritent. Lorsqu’une grande marque de mode utilise les motifs traditionnels d’une culture minoritaire sans la citer ni la mettre en avant, elle pille un savoir-faire ancestral et renforce son invisibilisation. Une approche respectueuse du monde de la mode consisterait à leur donner la possibilité de vivre de leur propre culture et de valoriser leurs systèmes de production, c’est-à-dire leurs manières de faire. 

C’est en donnant la parole et de la visibilité à des groupes trop souvent marginalisés que l’on peut construire un échange culturel équitable qui bénéficie à toutes et à tous. 


« L'appropriation culturelle, c'est lorsqu'un emprunt entre les cultures s'inscrit dans un contexte de domination. » 

Éric Fassin, sociologue

Culture

Par Rédaction Tilt

Sources :

  • Interview du sociologue Éric Fassin sur l’appropriation culturelle, Le Monde
  • « Appropriation culturelle : Comment la définir et pourquoi s'en préoccuper ? », article de la BBC
  • « Appropriation culturelle : peut-on « voler » une culture ? », article de The Conversation
  • « Appropriation culturelle, le racisme l’air de rien », podcast de Binge Audio

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