Comment lutter contre les

violences alimentaires ?

Bénédicte Bonzi

Alors que le gaspillage alimentaire ne fait qu’augmenter, l’accès à une alimentation saine et choisie est une lutte quotidienne pour plus de 7 millions de personnes en France (Cocolupa 2020). Entre dépendance à l’aide alimentaire, privation et sentiment de honte, les violences alimentaires reproduisent des systèmes de classes à travers l’alimentation. Quelles formes prennent ces violences ? Quelles sont leurs conséquences ? Comment garantir un droit à l’alimentation pour toutes et tous ? Bénédicte Bonzi, docteure en anthropologie et auteure de “La France qui a faim”, t’en dit plus sur le sujet !

Tilt - C’est quoi les violences alimentaires ?

Bénédicte Bonzi : Les violences alimentaires, ce sont des violences structurelles. On pourrait faire le choix politiquement et économiquement de permettre à tout le monde d'accéder en quantité et en qualité suffisante à une nourriture qui fasse du bien au ventre et à la tête, et qui permette aux personnes de se projeter dans un futur désirable. Ce n'est pas ce choix de société qu'on fait actuellement.

Si ces violences s'appliquent, c'est bien qu'il y a des responsables. Elles ne sont pas liées à quelque chose d'insaisissable. Les responsables peuvent être le système agro-industriel ou encore l'État, qui prennent des décisions économiques et politiques conduisant à la confiscation de l'accès à la ressource. Ce qu'on observe dans les causes de la violence alimentaire, c'est cette libéralisation du marché où, si vous avez les moyens, vous avez votre niche de la bio et vous mangez ce que vous voulez. Pour ceux qui n'ont pas les moyens, on crée autre chose. 

Cela pose problème, car la nourriture et le fait de partager un repas ont des valeurs fondamentales. Si nous nous séparons et ne mettons pas la même chose sur la table, nous cessons d'être des compagnons. On reproduit ainsi des systèmes de classes et de catégories sociales à travers l’alimentation.

Comment les conflits politiques peuvent-ils devenir sources de violences alimentaires ?

B.B. : Les conflits politiques peuvent devenir source de violences dans différents pays, notamment ceux du Sud. Et je crois qu'on en a eu la triste illustration, et on l'a encore, par rapport au conflit israélo-palestinien et tout ce qui s'est passé dans la bande de Gaza, où on a vraiment empêché le fait de pouvoir venir nourrir les personnes.

On va affamer les populations de manière voulue et souhaitée et on va faire le choix d'avoir une politique pour venir détruire les réserves alimentaires des différents pays. Aujourd'hui, l'alimentation est utilisée comme arme de guerre. On continue dans cet usage de la violence, à imposer une autre façon de se nourrir aux personnes.
Au-delà des solutions, je pense qu'il y a une forte résistance politique, notamment à travers le mouvement de La Via Campesina pour ce qui concerne la politique agricole au niveau international et la souveraineté alimentaire.

Est-ce que le projet d’une Sécurité sociale de l’alimentation peut mettre fin aux violences alimentaires ?

B.B. : Si au départ, je pensais que ce projet de Sécurité sociale de l’alimentation était utopique, en reprenant mes notes et en regardant ce qui se passait sur le terrain, je me suis dit non, c'est bien vers ça qu'on doit tendre. On doit s'inspirer d'un modèle qui a marché la Sécurité sociale.

Tout le monde a droit à 150€ par mois, par personne, dédiée à une alimentation choisie ensemble. Et là, c'est formidable, on remet de la démocratie dans les assiettes.

Le projet de Sécurité sociale en 45, il est puissant parce qu'on se base sur de la cotisation, parce qu'on se dit qu'avec notre travail, en fait, on a une richesse qu'on peut utiliser pour mettre en place une société plus juste. Et là, de la même manière, si on se recale sur ce système, on peut imaginer de faire front face aux risques alimentaires pour tout un tas de personnes.

MasterTilt, c’est quoi ? 

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