Forêt

Comment repenser notre
lien à la nature ?
Gladys Barragan-Jason

Rédaction Tilt le 15/09/2025

5 min de lecture 🧠   Niveau « Je me débrouille »

Est-ce qu’on a perdu notre lien avec la nature ? Dans nos modes de vies actuels, nous habitons de plus en plus loin des espaces naturels. Cette distance – physique et psychologique – fragilise notre rapport au vivant. Pourtant, se reconnecter à la nature n’est pas un luxe : c’est une condition essentielle à notre santé et à la santé des écosystèmes. Et oui, car plus on est connecté à la nature, plus on choisit de la préserver ! Alors comment renforcer notre sentiment d’appartenance à la nature ? Pourquoi est-il si urgent de repenser notre relation au vivant ? Et en quoi cette reconnexion peut-elle changer à la fois notre bien-être et notre capacité à protéger la planète ? On a posé ces questions à Gladys Barragan-Jason, chercheuse au CNRS et à la Station d’Ecologie Théorique et Expérimentale.

Tilt - Quels sont les impacts de notre mode de vie moderne sur notre lien à la nature ?

Gladys Barragan-Jason : On observe actuellement, dans nos sociétés occidentales, une déconnexion humain-nature. Quand je parle de déconnexion, je parle de la déconnexion à la fois psychologique, qui est associée à une déconnexion physique à cause de l'urbanisation croissante.

Une grande majorité de la population mondiale vit en ville et on s'attend à ce que ça augmente encore plus d'ici 2050. Et il faut savoir qu'actuellement, dans le monde, on a mené une étude qui montre qu’en moyenne les personnes vivent à dix kilomètres d'une zone peu impactée. Ça veut dire qu’elles ont besoin de parcourir dix kilomètres pour arriver à une zone naturelle et pour avoir un lien physique avec cette zone.

En France on est à 16 kilomètres, en Allemagne, 22 kilomètres. Et on pense que ces deux types de déconnexion, psychologique et physique, ont mené à nos pratiques non durables et nos valeurs non durables, comme la surexploitation, la surconsommation, etc.

Tilt - Pourquoi est-il urgent que l’humain se reconnecte à la nature ?

Gladys Barragan-Jason : On sait qu'on doit faire face à des grands défis environnementaux qui sont l’effondrement de la biodiversité et le changement climatique. Il y a les deux grands groupes d'experts, le GIEC pour le climat et l’IPBES pour la biodiversité, qui indiquent qu'on ne pourra pas atteindre les objectifs de durabilité, c'est-à-dire améliorer le bien-être humain et la santé des écosystèmes, sans des changements “transformateurs” de nos valeurs. Sans une prise de conscience de cette interdépendance entre santé humaine et santé des écosystèmes. Et ils pensent vraiment que revoir notre relation au vivant est la clé.

Il y a beaucoup d'études qui ont été publiées sur le sujet. Et elles montrent que les personnes les plus connectées à la nature sont en meilleure santé physique et mentale et ont plus de comportements en faveur de l'environnement. Donc effectivement, cette connexion à la nature, elle est hyper importante parce qu'elle est liée à une relation durable, on n’oppose pas l'un à l'autre. C'est comme ça, de manière synergique, qu'on va pouvoir aller vers un futur durable et souhaitable.

Tilt - Comment renforcer son sentiment d’appartenance à la nature ?

Gladys Barragan-Jason : Pour renforcer le sentiment d'appartenance à la nature, on a mené une méta-analyse. Les résultats de la méta-analyse montrent qu’un contact direct avec la nature, donc passer du temps dehors, a un impact positif sur la connexion à la nature, en particulier quand il est fait en association avec la pleine conscience. C’est un terme très connoté qui est utilisé dans plein de cercles. En science, ça veut juste dire se concentrer sur le moment ou l'environnement présent, c’est être dehors en faisant attention à ce qu’il se passe autour, et c'est ça qui fonctionnait le mieux. 

Ce qui ne fonctionne pas du tout, ce sont les cours d'écologie à l'intérieur ou les conférences à l'intérieur. Ça ne veut pas dire que ça n'a pas d'effet sur les comportements en faveur de l'environnement, mais ça passe par d'autres mécanismes comme par exemple quand on lit les résultats du GIEC, on observe une augmentation de l’éco-anxiété. Pour lutter contre cette éco-anxiété, les personnes vont agir mais ça ne va pas améliorer leur bien-être ni leur santé. Alors que la connexion à la nature est censé être liée à la fois à la santé de la personne, mais aussi à son engagement pro-environnemental. C'est pour ça que pour moi, c'est une piste plus intéressante que de provoquer de l’éco-anxiété.

Pour résumer, on renforce son sentiment d'appartenance à la nature en passant du temps le plus possible à l’extérieur, dans des parcs par exemple, en végétalisant aussi l'intérieur de sa maison et en pratiquant la pleine conscience. On peut juste s'asseoir sous un arbre, regarder des feuilles, fermer les yeux, écouter les sons. Ça n'a pas besoin d'être long, mais si c'est quotidien, il y aura un impact sur votre connexion à la nature.

MasterTilt, c’est quoi ?

MasterTilt, ce sont des interviews d’expert.e.s qui reviennent en profondeur sur leur sujet d’étude : d’abord, ils.elles décryptent les défis du monde, ensuite, ils.elles nous donnent leurs bons tuyaux pour agir.

Biodiversité

Par Rédaction Tilt

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