Les espèces sentinelles,c'est quoi ?
Les sentinelles sont des guetteurs chargés de donner l’alerte. On dit qu’une espèce est sentinelle, car elle signale avant les autres que quelque chose ne va pas dans leurs milieux. Elles sont plus sensibles aux changements du climat, à la pollution, aux conséquences écologiques…. On ferait bien d’écouter leurs signaux d’alerte !
Sentinelles de la nature : ces espèces sensibles aux changements environnementaux
Certains animaux, végétaux ou champignons sont plus sensibles aux modifications de l’environnement. Un changement dans l’écosystème, et ils vont lancer des signaux de détresse avant les autres. C’est pourquoi on parle d’espèce sentinelle : elles donnent l’alerte. Ça peut, par exemple, être des feuilles qui meurent par petits bouts, ou des insectes qui changent de comportement. Ou encore si l'on observe plus de décès, moins de naissances, ou plus de migrations dans un groupe. Les espèces sentinelles nous aident notamment à détecter les modifications écologiques encore peu visibles du changement climatique.
Abeilles: une espèce sentinelle incroyable pour la nature
Les abeilles ont beaucoup de mérite : pollinisateurs hors pair, elles produisent aussi du miel qui ravit nos papilles, à la campagne et sur les toits des immeubles ! Les abeilles sont de vraies contributrices de la biodiversité en ville.
Mais ce n’est pas tout : l’abeille est une espèce sentinelle au coeur de l’actualité car leur sirène sonne en permanence ! Leur taux d’extinction est 100 à 1000 fois supérieur à la normale. En cause : le réchauffement climatique, la pollution, les pesticides, mais aussi les espèces invasives - comme le frelon asiatique dévoreur d’abeilles -, les parasites et la pollution de l’air, du sol et de l’eau. Une abeille est très sensible aux effets des polluants parce qu’elle en rencontre beaucoup. Elle se déplace tous les jours dans un rayon de 3 km autour de sa ruche.
Une espèce sentinelle en cage, de qui s'agit-il ?
Le canari qui accompagne les visiteurs dans le film Avatar n’est pas inspiré de la science-fiction, mais de l’ingéniosité des mineurs de fond. Emmené dans les mines, un canari alertait de la présence de monoxyde de carbone.
Ce gaz peut être mortel à partir d’une certaine dose, mais petit problème : il est imperceptible, incolore, inodore, sans saveur et non irritant : impossible de savoir si l'on court un risque ! Lorsque le gaz est présent, le canari, plus sensible que les humains, est patraque avant nous. Il suffit donc de le surveiller pour donner l’alerte !
Les lichens, ces sentinelles de l’environnement dotées d’ubiquité
Les arbres perdent leur lichen ? La diversité des espèces de lichen diminue ? Pas de doute, cela veut dire que la pollution augmente. Les lichens absorbent presque tous les polluants. Le taux de pollution est donc directement relié à la quantité et à la diversité de lichens sur les arbres. Et comme les lichens sont partout, ils sont beaucoup plus efficaces pour lancer l’alerte qu’un capteur électronique qui n’absorbe les contaminants qu’à l’endroit où il est placé.
Les dauphins, leur état de santé peut donner l’alerte
Les dauphins sont peut-être connus pour être mignons et attachants, mais il ne faut pas oublier que ce sont aussi des prédateurs au sommet de la chaîne alimentaire. Et il leur faut une excellente qualité d’eau, mais aussi une grande diversité de proies en bonne santé. En se nourrissant, ils accumulent la pollution de toutes les autres espèces.
Les dauphins cachent sous leur peau bien des secrets. Les scientifiques détectent pleins de composés issus des activités humaines : produits chimiques, métaux lourds, pesticides et nano plastiques (particules désagrégées - un million de fois plus petites que le millimètre). Ils signalent la toxicité des composés dont on ne connaît pas encore les effets sur l’écosystème marin.
Si ces sentinelles de l'océan vont bien, c’est que le reste de la chaîne alimentaire se porte bien. Si au contraire les cétacés commencent à tomber malades, c’est que leur protection immunitaire, leur système neurologique et leur reproduction sont touchés, c’est le signe que quelque chose ne va pas. Et que c’est potentiellement aussi une menace pour nous, les humains, puisque après tout, on mange les mêmes poissons qu’eux.
Les sentinelles de l’océan : des bioindicateurs pour l’environnement marin
Qu’est-ce qu’un bioindicateur ?
Un bioindicateur est un organisme vivant utilisé pour évaluer la qualité de l'environnement. Il sert de témoin ou d'indicateur des conditions écologiques d'un écosystème, permettant ainsi de surveiller les variations et les impacts des facteurs environnementaux.
Les huîtres, un bioindicateur du littoral ?
Les huîtres se nourrissent en filtrant une très grande quantité d’eau de mer. Elles rejettent l’eau et gardent ce qu’il leur faut pour respirer et se nourrir. Mais pas seulement. À travers ce processus, elles accumulent aussi les métaux lourds et autres produits chimiques.
Résultat : plus on en trouve dans le coquillage, plus il y en a dans l’eau. Plutôt logique ! Analyser un prélèvement d’huître ou de moule, c’est un moyen efficace de mesurer le niveau de contamination de l’eau de mer et c’est ce que fait tous les ans l’Institut français lors de ses recherches pour l’exploitation de la mer l’IFREMER (Institut français pour l’exploitation de la mer).. Et oui, les sentinelles du littoral existent et participent activement à la surveillance de l’environnement.
Comment les scientifiques s’en servent ?
Un exemple de projet qui montre comment on peut écouter et analyser les informations des espèces sentinelles est le projet ECONECT. Ce projet, qui a démarré en 2020, regroupe six laboratoires et trois entreprises en France autour d’un but commun : étudier la réponse d’espèces animales dites “sentinelles” aux différents stress environnementaux et de pollutions.
L’étude consiste à recueillir des observations en suivant le comportement d’abeilles, d’oiseaux et d’escargots aquatiques appelés limnées. Par exemple, des fleurs connectées servent à mesure les capacités cognitives des abeilles. Car en présence de pesticides, les abeilles sont moins intelligentes, elles perdent leur chemin, n’arrivent plus à réaliser leurs tâches. La preuve que les pesticides ont un impact sur leur système nerveux et perturbent ces espèces indicatrices de changement.
En bref :
En bref, les sentinelles sont des espèces vivantes qui donnent des informations clés pour signaler des dangers de leur environnement.
Une fois le réseau de sentinelles déployé, les capteurs connectés, les fleurs plantées, chaque escargot apathique, chaque abeille égarée, chaque oiseau plus bête que la moyenne enverra un signal au serveur du projet
Arnaud Elger, écologue et enseignant-chercheur au laboratoire d’écologie fonctionnelle et environnement (ECOLAB) partenaire du projet ECONECT
Pour creuser le sujet
- Plutôt surprenant, les chats sont les sentinelles de la pollution des villes. 5 minutes pour comprendre sur cet article du Monde.
- Le blog du Centre de développement de l’agroécologie. Eh oui, l’agriculture a des espèces sentinelles de toutes sortes. Copieux, mais facile à lire.
- Être une sentinelle, c’est possible. Rendez-vous sur le site des sentinelles de la nature pour savoir donner l’alerte.
- Le climat a aussi ses sentinelles. Un article sur les changements de comportement des marmottes et des papillons face au réchauffement climatique
- Le Groupe d’Étude des Cétacés du Cotentin étudie de près les dauphins : pour en savoir plus découvre cet article
Par Rédaction Tilt
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